Lovina, station balnéaire fantôme

Écrit par Cyril   
27-12-2008
 

Lovina. Un nom qui fait rêver. Qui me fait rêver rien que par la sonorité. Cela signifie "I love Indonesia". D'un point de vue touristique, Lovina est synonyme de possibilité de voir des dauphins au large de la côte. Lovina est situé au nord de l'Ile, sur la ligne médiane Balinaise. Lovina n'est en fait pas une ville, mais un nom donné à un regroupement de plusieurs communes. Avouez que c'est plus romantique que Kalibukbuk ou Bunutpanggang.

Nous avions donc souhaité rester quelques jours dans ce paradis Balinais.

La réalité est davantage fidèle à Kalibukbuk qu'à Lovina. Pourtant le potentiel est bien présent, du moins en terme d'activités et surtout en terme de prestations hôtelières... enfin encore pour quelques années, pour les optimistes, quelques mois pour les autres. Se balader dans les rues de Lovina fout un coup au moral. De nombreux hôtels et restaurants qui jadis exposaient fièrement de somptueux portails et devantures, sont maintenant fermés. Quelques fois un écriteaux "For sale" (A vendre).vient confirmer que ce n'est pas une fermeture saisonnière, mais belle et bien définitive.

La raison directe saute aux yeux. Parmi les touristes présents ce jours sur la plage, il y a bien le couple de Néerlandais, celui de Français, deux anglaises venues pour trois jours, et, ah oui, nous quatre. Heureusement que nous sommes là, ça permet de doubler les effectifs. Difficile de faire vivre un village entier essentiellement tourné vers le tourisme depuis quelques décennies avec la poignée de touristes que nous sommes.

Certes, ça le fait d'avoir la piscine de l'hôtel rien que pour nous quatre. Une piscine privée avec trois (grands) bassins en nénuphar. Ils exagèrent, ils savaient pourtant que nous venions à quatre... En quatre jours sur place, nous aurons été toujours seuls dans cette piscine de rêve. Pourtant nous n'avons pas visé le haut de gamme, jugez plutôt : 12 € la nuit pour notre petite famille, petits déjeuners inclus. Oui, il s'agit bien de douze euros. Pas de zéro oublié à l'écriture de cet article. Côté personnel, le ratio personnel/touriste ferait hérisser les cheveux de Carlos Ghosn ou de n'importe quel actionnaire avide d'une rentabilité immédiate. Notre repas est préparé par cinq personnes en cuisine aidées d'une serveuse. Bon, c'est quand même cette même serveuse qui vient prendre les commandes et qui nous sert les plats. Le jardin tropical est entretenu par une demi-douzaine de jardiniers qui coupent branches et feuillages, récupèrent les noix de coco et entretiennent la piscine. Le ménage est effectué par trois femmes qui s'occupent également de balayer les allées des feuilles et récupèrent les jolies fleurs déposées par le vent pour préparer les offrandes. Quatre jours sur place, et nous n'aurons vu passer que 7 personnes restant guère plus de 2 nuits.

Notre hôtel n'est bien sur pas le seul de Lovina. Il en existe une bonne trentaine encore ouverts. Comment peuvent-ils survivre avec si peu de touristes ? Ben justement, ils ferment petit à petit. Le notre est dans une rue perpendiculaire à la côte, à 50 mètres de la plage. Une rue encore épargnée par les fermetures. La rue parallèle au rivage, à 200 mètres de l'océan, n'a pas la même destinée. 90 % des hôtels et restaurants, dont on devine les ambiances balnéaires jadis sympathiques, sont fermés, en friche, abandonnés. Quelques boutiques subsistent, vendant boissons et quelques gâteaux. Mais qui passe par ici ? Oui, nous. Bon, les autres touristes doivent peut-être y aller également. Nous n'en avons cependant croisé aucun. Qui peut donc faire vivre ces familles balinaises ? A Kuta, le nombre de boutiques et leur offre est assez impressionnant. Mais il y a des acheteurs potentiels. Ici, on sent que l'offre a été très importante à une époque. Elle est encore bien présente dans certaines rues, mais la demande a clairement décidée de se taire et de ne pas se montrer. Il est vrai que lorsque nous souhaitons boire un petit verre, un jus de bananes pour les filles et une Bintang pour moi (simple jus de houblon malté avec quelques bulles ;-), nous sommes davantage motivés par un bar donnant sur la plage, là où d'ailleurs 2 tables sont déjà occupées que dans un bar donnant sur la route où passe à toute vitesse voitures et mobylettes. Certains bars tentent pourtant de résister. Pour combien de temps ?

Si vous recycler dans la restauration ne vous tente pas trop, peut-être souhaiteriez-vous tout simplement acquérir une villa au bord de l'océan. Nous avons eu l'occasion de voir plusieurs offres disponibles dans un restaurant. Je vous l'annonce tout de suite, il faut cependant être milliardaire. La prestation fait rêver. Les photos présentées également. Imaginez une piscine de 60 m2. De part et d'autre, 2 bâtiments. En face, la villa principale, 350 m2 habitable. Dans chacun des bâtiments, chambres et salles de bain privées, idéal pour recevoir des amis. Dans la villa, la famille pourra loger dans les 5 chambres doubles. Toutes avec salle de bain privative, un grand séjour avec cuisine américaine, un grand salon. En rez de chaussé, une pièce toute en longueur, face à la piscine, accueil un gigantesque bar, idéal pour y placer un billard. Le jardin est luxuriant, le portail, digne d'un château. Il faut être milliardaire pour pouvoir espérer se payer une telle villa à Bali. Pas moins de 1 600 000 000 Roupia vous seront nécessaires pour vous en porter acquéreur. Ce n'est que lorsque vous convertirez en Euros, que vous viendront les plus merveilleuses idées de nouvelle vie ou de business. Pour cela, il faut diviser par... 15 000 ! La villa devient tout d'un coup accessible pour bien moins cher que le prix d'un terrain à bâtir de 1000 m2 en région parisienne, sans maison, sans piscine. Avec comme axiome de départ cependant : le fait de considérer que Orléans, c'est en région parisienne. Oui, à 110 000 Euros, on a pas grand chose en France. Ici, on a l'embarra du choix, comme nous pouvons le voir sur les nombreuses annonces disponibles derrière la vitrine d'une agence immobilière de Lovina. Les prix sont presque aussi bas, les photos toutes plus belles les unes que les autres.

Pourquoi tout le monde fuit Lovina ?

L'un des 15 vendeurs ambulant nous accostant dès notre première sortie à la plage me dira que son business de vente de coquillages ne marche vraiment pas bien. Et cela dure depuis 2002, date à laquelle une bombe explosa à Kuta. Pourquoi un touriste bouderait une ville, un pays, sous prétexte qu'une bombe y a un jour tué ? Imaginez que Paris soit boudée ainsi depuis 1995 ! Parmi les quelques touristes, seuls ceux qui viennent pour la première fois à Bali achètent quelques souvenirs, précise le vendeur ambulant. Les habitués ont déjà fait leurs achats quelques années auparavant. Comment lui dire que pour nous, c'est la première fois que nous venons, mais qu'il est hors de question d'emporter dans nos bagages un coquillage. Trois jours plus tard, nous nous porterons acquéreur de 3 petits pendentifs, plus pour participer à la vie économique du village que par besoin. Les filles sont cependant contentes de ce nouveau bijoux, acheté après d'âpres négociations à 75 000 Roupia (5 €) l'un quand quelques minutes plus tard, 3 ou 4 autres vendeurs nous proposent les mêmes pour 5 000 Roupia pièce. De prime abord, rageant. Mais ce sera notre modeste contribution à mettre un peu de beurre dans ses ép... son riz.

Venez donc tous visiter Lovina, sa plage, ses dauphins, son océan et, heu, ses mammifères à aileron, ceux à nageoires, sa mer, son sable, ses coquillages et ses cocotiers ! Histoire de redonner vie à cette station balnéaire qui a maintenant des allures de village fantôme.

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Commentaires utilisateurs (2) Fil RSS des commentaires
Posté par Mél, le 28-12-2008 07:32, , Invité
1. Bravo le journaliste...
100 jours et le style journalistique ets plus affirmé, la plume plus vive et capable de rendre l'émotion... 
Triste village fantôme par contre...  
BIsous 
Mél
 

Posté par Elfie, le 04-01-2009 18:54, , Invité
2. operation commando
bon, aux grands maux les grands remedes: prochaines grandes vacances, depart en groupe, au moins a 30 amis, direction Lovina : voyage de roi a prix eco, avec piscine et toboggans rien que pour nous :-)
 

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