Pauvres
enfants, au sens propre comme au sens figuré.
Un
enfant. Il ne demande pas à venir au monde. Pourtant il arrive
comme ça, le plus souvent dans une famille. Il peut très
bien naitre dans une famille aisée du fin fond de la France,
comme dans une famille modeste du 16ème à Paris
(arrêtons les clichés ;-). L'un aura peut-être
droit à sa télé et sa console de jeu dans sa
chambre, tandis que l'autre devra peut-être se contenter d'un
camion de pompier. L'un ira souvent au bord de la mer dans une
résidence secondaire, l'autre à Paris plage s'initier
au beach volley. Ils auront cependant de toute manière une
scolarité similaire et une vie décente.
L'Inde
présente un grand nombre d'inégalités,
renforcées par le système de castes, toujours présent
de nos jours. Ainsi seuls certains enfants privilégiés,
issus de familles riches, peuvent bénéficier de
l'instruction. Les autres, pour la plupart, restent avec leur mère
(souvent au foyer) ; certains vivent dans la rue.
Cet
enfant peut naitre dans une famille Indienne. De la même
manière, il peut naitre dans une famille aisée, c'est
le cas de Tina, la fille du gérant de la guest house à
Jaipur. Elle va à l'école, ce qui est payant en Inde.
Elle parle couramment l'anglais à 9 ans, en plus de sa langue
maternelle. La vie n'est pas aussi simple qu'en France, mais elle a
la possibilité d'évoluer dignement.
Il
peut naitre dans une famille modeste, et s'il a de la chance, il
pourra travailler comme vendeur ambulant ou être employé
comme domestique chez les familles aisées. Ainsi nous avons eu
l'occasion de côtoyer, dans notre Guest House, Wassen, un
enfant de 12 ans, dont les taches quotidiennes étaient
d'effectuer le ménage de notre chambre ainsi que du reste de
la maison, de préparer et servir les repas, d'effectuer
quelques courses, d'arroser le jardin et d'apporter un verre d'eau au
maitre de maison à sa demande. Cet enfant vit dans cette
maison, envoyant régulièrement de l'argent à sa
famille restée à la campagne. Il dort sur un matelas de
fortune installé chaque soir dans la cuisine. Et, alors que
nous mangions à la table de la salle à manger, lui
mangeait par terre, dans la cuisine ! Le temps de jacqouille la
fripouille n'est pas si révolu que ça...
Mais
cet enfant peut aussi naitre d'une mère mendiante, dans la
rue. S'il arrive à survivre, il pourra alors dès le
plus jeune âge, aider sa mère à faire la manche.
En Inde, ça commence dès les premiers jours. Comme cet
enfant des 3 mois pas plus, que j'ai failli écraser de mes
pieds en longeant la rue commerçante, Alix sur mes épaules.
Il était par terre, à plat ventre, là où
je n'osais même pas déposer Alix pour qu'elle marche,
pourtant chaussée de grosse chaussure de marche. Par terre,
c'est à côté évidement du petit ruisseau
alimenté par les eaux usées de chacune des habitations,
des toilettes publics du coin de la rue, c'est également à
côté de détritus jetés par advertance
(oui, c'est un nouveau mot) par terre, et à 10 centimètres
d'un bon gros crachat. Par l'image qu'il dégage, il est censé
apitoyer le touriste qui lâchera une pièce. Cet enfant
pourra, lorsqu'il sera grand, vers l'age de 1 an et demi, courir
après les touristes pour leur quémander un roupie, tel
que celui qui m'a suivi pendant bien 15 mètres, avec un bras
rentré sous son pull, le rendant bossu du ventre avec une
manche vide, pendante. Quel parent peut en venir à maquiller
ainsi son enfant pour le rendre plus misérable que Quasimodo
et Causette réunis ? Et je pense qu'il faut un sacré
bourrage de crâne pour qu'un enfant aille à l'encontre
des "non" répétés du touriste fuyant
et insiste pour obtenir une pièce. Ce qui est dingue, c'est
que cet enfant n'a même pas notion de ce que peut représenter
l'argent. Pauvre enfant. Pourquoi es-tu venu au monde ici, alors qu'à
quelques secondes près, qui sait, ton esprit aurait pu
s'illuminer dans le corps d'un Australien promis à une
carrière de surfeur international ?
Mais
estime toi heureux, le diable aurait pu s'acharner contre toi et il
t'aurait alors affublé d'un bras tordu vers l'arrière,
d'un bec de lièvre et faire en sorte que tes dents (celle qui
daigneront rester) sortent vers l'avant de manière
désordonnée, tels des pics d'un chardon survivant au
milieu du désert. Quelle réaction auriez-vous si ce
dernier se postait devant l'une de vos filles sur le quai de la gare,
le visage à quelques centimètres du sien, le regard
bien dans les yeux ? Visiblement conscient de son faciès, que
cherche-t-il ?
J'aurais
peut-être pu avoir un peu de compassion, tenter de parler avec
lui, lui donner une petite pièce ou un des livres des filles.
Non, je l'ai chassé tel que j'aurai pu le faire en voyant un
chien enragé s'approcher de mes filles. Une réaction
spontanée que n'est pas digne de recevoir un enfant.
Pauvres
enfants. Au sens sale comme au sens défiguré.
Cet
enfant peut enfin naitre dans une famille de jeunes voyageurs et
avoir la chance de parcourir le monde. C'est ce que j'ai vécu
étant enfant. Sans avoir fait de nombreux pays ni même
fait le tour du monde, j'ai ainsi vécu 6 ans de mes 10
premières années en Afrique (Maroc, Sénégal)
et je crois que ce n'est pas étranger (sorry) à mon
souhait actuel de voyager.
Et
c'est ce que vivent actuellement nos filles par ce voyage autour du
monde et nos petites filles qui ont décidé de s'offrir
un voyage dans l'espace. Oui, ok, j'en sais rien. Ce seront peut-être
des petits gars ;-)
Beaucoup
d'inégalités, de chance et de malchance. Car l'enfant
qui nait ne choisit pas sa famille. J'ai de la chance, nous avons de
la chance. Sans s'en lamenter, ayons-en conscience.
A lire également :
Commentaires utilisateurs (4)
|
|
|